Bunka no Hi, le jour de la culture au Japon
Bunka no Hi, le jour de la culture au Japon

Bunka no Hi, le jour de la culture au Japon

L’automne au Japon, c’est la saison des récoltes, des saveurs riches et des journées encore lumineuses. Entre les marrons grillés, les patates douces et les festivals d’automne, il existe aussi une autre gourmandise, moins culinaire mais tout aussi nourrissante : la culture. Chaque année le 3 novembre, c’est Bunka no Hi, le jour de la culture. Un jour férié dédié aux arts, au savoir et à la créativité. Aujourd’hui, je vous propose d’en apprendre plus sur ce jour qui associe le souvenir d’un tournant historique et la joie de célébrer la culture sous toutes ses formes.

Bunka no Hi, la fête de la culture au Japon

À l’origine, le 3 novembre n’avait rien à voir avec la culture : c’était l’anniversaire de l’empereur Meiji, dont le règne fut de 1868 à 1912. L’anniversaire de l’empereur étant toujours férié au Japon (Tenno Tajobi), ce jour était chômé avant la guerre. Après 1945, le gouvernement choisit de conserver cette date, mais de lui donner un nouveau sens. Elle coïncidait avec un moment fondateur : la promulgation de la Constitution japonaise le 3 novembre 1946, un texte qui posait les bases d’un Japon pacifique et démocratique. Deux ans plus tard, en 1948, Bunka no Hi fut officiellement instauré comme jour férié, la loi le définissant comme « un jour pour aimer la liberté et la paix, et pour promouvoir la culture ».

Depuis, le 3 novembre est devenu une vitrine de la vie culturelle du pays. Les musées nationaux ouvrent leurs portes gratuitement, les universités organisent colloques et conférences, et des défilés, concerts et expositions se tiennent un peu partout. C’est aussi une journée où l’État met en avant la recherche et la création en distinguant celles et ceux qui ont contribué au rayonnement du Japon. Au Palais Impérial, l’empereur décerne chaque année l’Ordre du Mérite culturel (Bunka Kunsho). Généralement attribuée à cinq personnalités, cette distinction honore des écrivains, scientifiques, artistes ou inventeurs dont l’apport a marqué leur époque.

Pour l’anecdote, on dit que le 3 novembre est, statistiquement, la journée la moins pluvieuse de l’année au Japon. Un clin d’œil du ciel, qui permet presque toujours aux événements en plein air de se dérouler sous un temps radieux.

Bunkasai, les fêtes des écoles au Japon

Impossible d’évoquer Bunka no Hi sans parler des bunkasai, les fêtes des écoles japonaises. Vous avez sans doute déjà aperçu l’un de ces festivals scolaires dans un anime ou un drama japonais… Durant quelques jours, l’école entière change de visage : une salle de classe devient un café, une autre se transforme en maison hantée, le gymnase accueille une pièce de théâtre, et la cour vibre au son d’un concert organisé par le club de musique. Les élèves y investissent une énergie incroyable. Pendant des semaines, ils fabriquent des décors, répètent des danses, testent des recettes de curry japonais ou de desserts pour se préparer à accueillir le public. Jusqu’au lycée, les visiteurs sont souvent limités aux familles et anciens élèves, mais les bunkasai des universités sont quasiment tous ouverts au grand public. Ils réservent une atmosphère bien différentes des matsuri classiques, invitant à découvrir une école japonaise de l’intérieur et à flâner dans ses salles de classe et couloirs métamorphosés.

Beaucoup d’établissements programment leur bunkasai autour du 3 novembre, profitant du jour férié pour attirer un maximum de visiteurs. Dans l’imaginaire japonais, ces festivals sont presque aussi emblématiques que les undokai, les journées sportives durant lesquelles les élèves s’affrontent, souvent organisées début octobre pour Supotsu no Hi, un jour férié dédié au sport. L’un met en avant l’effort physique et l’esprit d’équipe, l’autre la créativité et l’expression culturelle. Tous deux restent gravés dans la mémoire des élèves, au point que la culture populaire (anime/manga, films, séries) regorge de scènes qui capturent l’effervescence de ces deux grands rendez-vous de l’année scolaire japonaise.

Les festivals pour Bunka no Hi

Les bunkasai ne sont pas les seuls rendez-vous culturels du jour : chaque 3 novembre, des matsuri plus traditionnels viennent eux aussi rythmer l’automne. En plus d’être le jour de la culture, cette période correspond à la fin des récoltes et à une saison propice aux célébrations populaires. D’un bout à l’autre de l’archipel, les villes et villages s’animent donc de processions, de danses et de rituels qui mêlent ferveur religieuse, histoire locale et esprit de fête. Voici par exemple une petite sélection de 10 festivals qui se tiennent le 3 novembre au Japon :

  • 1-3 novembre : Betcha Matsuri à Onomichi (préfecture de Hiroshima)
    À Onomichi, l’ambiance est électrique : les tambours résonnent, les cris fusent, et dans les rues, trois prêtres shintoïstes masqués en démons surgissent pour chasser les mauvais esprits. Armés de bâtons de bambou, ils frappent légèrement les passants (surtout les enfants) pour les protéger des maladies. Résultat : un étrange mélange de rires et de larmes, les petits oscillant entre terreur et éclats de rire.
  • 1-3 novembre : Yanagawa Hakushu Matsuri à Yanagawa (préfecture de Fukuoka)
    Dans la ville d’eau de Yanagawa, ce matsuri rend hommage au poète Kitahara Hakushu, disparu le 2 novembre 1942. Le soir, les canaux s’illuminent de centaines de lanternes en papier accrochées aux barques donko. Des musiciens, des chanteurs et même des harpistes embarquent pour un défilé aquatique féérique qui glisse sous les ponts de la ville. Un spectacle unique, entre poésie et magie, qui attire chaque année des foules entières sur les berges.
  • 2-3 novembre : Ohara Matsuri à Kagoshima (préfecture de Kagoshima)
    À Kagoshima, on ne plaisante pas avec la fête : l’Ohara Matsuri est le plus grand festival du sud de Kyushu, et il réunit plus de 20 000 danseurs dans les rues de la ville. Au son du Ohara-bushi, une chanson folklorique locale, les habitants dansent, souvent un verre de shochu à la main (l’alcool fort de la région), servi gratuitement aux participants. Entre musique et liesse collective, Kagoshima vit deux jours d’excès joyeux et de convivialité.
  • 2-4 novembre : Karatsu Kunchi à Karatsu (préfecture de Saga)
    Depuis plus de 400 ans, la ville de Karatsu remercie les divinités des bonnes récoltes avec le Karatsu Kunchi. Le clou du festival : 14 gigantesques chars (hikiyama) en forme de dragons, de lions ou de casques de samurai, laqués et décorés de feuilles d’or, qui paradent dans les rues et jusque sur la plage. De jour comme de nuit, portés par les chants, les flûtes et les taiko, ces colosses défilent dans une ambiance de ferveur populaire.
  • 3 novembre : Hakone Daimyo Gyoretsu à Hakone (préfecture de Kanagawa)
    À Hakone, on replonge dans l’époque d’Edo avec une reconstitution historique spectaculaire. Près de 170 figurants en costumes d’époque reproduisent la procession d’un seigneur féodal (daimyo) contraint par le système du sankin-kotai à rejoindre Edo avec toute sa suite. Étendards, kimono richement décorés, palanquins et armes défilent le long de l’ancienne route du Tokaido, recréant l’apparat d’un voyage d’antan.
  • 3 novembre : Ujisato Matsuri à Matsusaka (préfecture de Mie)
    Ce festival célèbre la mémoire de Gamo Ujisato, fondateur de la ville de Matsusaka. Autour des ruines du château, une procession de guerriers en armure, arquebuses à la main, traverse la ville dans un cortège impressionnant. Plus de 200 figurants participent à cette marche martiale, qui fait résonner le passé guerrier de la région.
  • 3 novembre : Inaho Matsuri à Kudamatsu (préfecture de Yamaguchi)
    L’un des matsuri les plus originaux du calendrier ! À Kudamatsu, on célèbre la fin des récoltes par… un mariage de renards ! Un couple, choisi chaque année en secret, se grime en renards blanc et gris et mène un cortège joyeux dans les rues. Mikoshi, danses et musiques accompagnent cette procession insolite, où le mariage animal symbolise fertilité et prospérité.
  • 3 novembre : Kukai Matsuri à Zentsuji (préfecture de Kagawa)
    À Zentsuji, ville natale de Kukai, fondateur du bouddhisme Shingon, un festival lui est consacré chaque année. Une statue du maître est portée en procession, et tout autour du temple, des spectacles populaires se succèdent : danses, parades, combats de bébés sumo tenus par de jeunes lutteurs. Entre spiritualité et divertissement, c’est un hommage vivant à l’une des plus grandes figures religieuses du Japon.
  • 3 novembre : Yoshidacho Aki Matsuri à Uwajima (préfecture d’Ehime)
    Organisé dans l’agréable ville d’Uwajima, ce festival démarre à l’aube avec un tournoi de sumo pour enfants. Ensuite, les rues se remplissent de mikoshi, de démons-bœufs (ushi-oni) et de danses du lion. Ce matsuri, vieux de plus de 350 ans, conserve une atmosphère très locale, faite de traditions transmises de génération en génération.
  • 3-5 novembre : Fujinomiya Matsuri à Fujinomiya (préfecture de Shizuoka)
    Au pied du mont Fuji, Fujinomiya célèbre ses récoltes avec un grand défilé de chars et de mikoshi. Les quartiers de la ville se rassemblent au sanctuaire Sengen-taisha dans une ambiance sonore : taiko, flûtes, danses folkloriques. Le panorama du mont Fuji en toile de fond rend ce festival encore plus spectaculaire.

J’espère que cet article vous aura permis d’en apprendre plus sur Bunka no Hi et toutes les célébrations qui entourent ce jour férié. Entre les bunkasai des écoles et les grands matsuri d’automne, cette période de l’année est une jolie explosion automnale ! Si vous avez envie de prolonger la lecture et de trouver d’autres idées de découvertes, je vous invite à parcourir aussi mes autres articles sur Tori no Ichi, les foires du mois de novembre au Japon, et sur Shichi Go San, la fête des enfants de 3, 5 et 7 ans.

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  1. Styff_panda
    27 octobre 2025

    Merci pour cet article. Je pense retourner au Japon durant cette période l’année prochaine. Ça pourrait sympa de se faire un bunkasai.