Les chats au Japon
Les chats au Japon

Les chats au Japon

Mystérieux et indépendants, les chats sont de mignonnes créatures ayant réussi à tisser un lien particulier avec les Japonais. On en croise partout au Japon : lovés sur les marches d’un sanctuaire, errant en bande dans une ruelle tranquille ou somnolant à l’ombre d’une voiture près d’un port. Parmi les nombreuses célébrations non officielles du pays, une journée leur est même dédiée : le 22 février, connu sous le nom de Neko no Hi (journée du chat). Instaurée en 1987, cette journée est l’occasion de célébrer les félins sous toutes leurs formes. Je vous propose donc aujourd’hui d’en apprendre plus sur les chats au Japon !

LE JAPON ET LES CHATS : UNE LONGUE HISTOIRE D’AMOUR

L’histoire des chats au Japon remonte à plus d’un millénaire. Ils auraient été introduits dans l’archipel au VIe siècle en provenance de Chine, transportés à bord de navires afin de protéger les textes bouddhiques des rongeurs. Rapidement, ces félins ont trouvé leur place au sein des temples et des foyers aristocratiques, fascinant les Japonais par leur agilité et leur mystère. Durant l’époque d’Edo (1603-1868), les chats étaient même protégés par des décrets shogunaux. Ils étaient en effet précieux pour lutter contre les rats qui menaçaient les récoltes, et les estampes de cette période représentent souvent des chats aux côtés de courtisanes et d’artisans. Il était ainsi interdit de les vendre ou de les attacher, afin de ne pas entraver leur mission de chasse aux rongeurs. Ces décrets favorisèrent la multiplication des chats errants, qui font désormais partie du paysage urbain, notamment dans les ruelles, parcs, temples et sanctuaires.

Les chats occupent une place particulière dans la culture populaire japonaise, imprégnant contes et croyances de leur mystère. Parmi les créatures légendaires, le Bakeneko et le Nekomata sont décrits comme des félins aux pouvoirs surnaturels, capables de se métamorphoser ou d’influencer les esprits. On racontait d’ailleurs que les chats ayant vécu de longues années pouvaient prendre une apparence humaine ou manipuler leur entourage. Cette fascination pour les félins se retrouve aussi dans les arts, notamment à travers les estampes d’Utagawa Kuniyoshi (XIXe siècle), où ils apparaissent espiègles et dotés de traits anthropomorphiques. En littérature, Je suis un chat, roman satirique de Natsume Soseki publié en 1905, offre un regard acéré sur la société japonaise à travers les yeux d’un chat observateur et moqueur.

Aujourd’hui, le chat est devenu l’animal de compagnie préféré des Japonais, avec environ 9 millions de chats domestiques contre 6 millions de chiens. Cette passion féline s’exprime à travers des lieux dédiés, comme bien évidemment les neko cafés, ces cafés à chats où les clients peuvent boire un thé tout en caressant des félins. Apparues au début des années 2000 à Osaka, ces adresses ont rapidement conquis le reste du pays, en particulier les grandes villes comme Tokyo, où de nombreux habitants ne peuvent pas avoir d’animaux de compagnie en raison du manque d’espace ou des restrictions imposées par les propriétaires des logements. Si depuis le succès de ces cafés, on en trouve désormais plein d’autres farfelus et peu éthiques, considérant très peu le bien-être animal, tels que des cafés à pingouins, hérissons, reptiles ou encore chouettes, les cafés à chats sont souvent les rares à se soucier réellement des animaux, bien qu’il en existe aussi malheureusement certains peu scrupuleux. Dans ces cafés, chaque chat est soigneusement sélectionné pour son caractère sociable et son bien-être est une priorité : des règles strictes encadrent les interactions, interdisant par exemple de les porter contre leur gré ou de les déranger lorsqu’ils dorment. Certains établissements se spécialisent dans des races spécifiques, tandis que d’autres, les plus pertinents à mon sens, recueillent des chats abandonnés, offrant ainsi une seconde chance à ces félins tout en sensibilisant le public à l’adoption.

En dehors des neko cafés, il existe également plusieurs îles aux chats, des lieux où ces animaux vivent en quasi-liberté, souvent plus nombreux que les habitants. Les Japonais expriment aussi leur attachement aux chats à travers des mascottes célèbres (la plus populaire étant Hikonyan, mascotte de la ville de Hikone) et des traditions insolites. Dans certaines gares, des chats ont même été nommés « chefs de gare », comme Tama, la célèbre chatte de la station de Kishi (préfecture Wakayama), qui a attiré des milliers de visiteurs et sauvé la gare de la fermeture, ou encore Sakura, le chef de la gare d’Ashinomaki Onsen (préfecture de Fukushima). Les photos n’y sont pas autorisées afin de laisser les chats tranquilles. Enfin, plusieurs festivals japonais mettent à l’honneur les chats, comme le Kagurazaka Bakeneko Matsuri à Tokyo ou le Maneki-neko Matsuri à Seto, qui célèbrent chaque année ces animaux emblématiques.

NEKO NO HI, LE JOUR DU CHAT AU JAPON

Chaque année le 22 février, le Japon célèbre la journée du chat, une fête instaurée en 1987 par la Japan Pet Food Association dans le but de mettre à l’honneur ces adorables compagnons à quatre pattes. Cette date a été choisie, comme bien souvent au Japon, pour son jeu de mots sonore : le chiffre « 2 » se prononce ni en japonais, et répété trois fois de suite (ni-ni-ni pour 22/2), il évoque le miaulement d’un chat (nyan-nyan-nyan).

Ce jour du chat constitue l’une des nombreuses journées non officielles du Japon. Chaque jour de l’année est en effet associé à une, voire plusieurs fêtes, le plus souvent grâce à un jeu de mots avec la date. Ces journées non officielles sont pour la plupart totalement inconnues des Japonais, mais servent parfois à créer des occasions de vente pour certaines boutiques qui jouent sur l’événement. Pour la journée du chat, ce sont surtout les réseaux sociaux sont envahis de photos et vidéos de félins sous le hashtag #NekoNoHi, où l’on découvre des chats endormis, espiègles ou même déguisés pour l’événement. Quelques marques saisissent aussi cette opportunité : certaines lancent des produits en édition limitée, avec des snacks aux emballages ornés de félins ou des pâtisseries en forme de chat. Même des compagnies de transport, comme le métro de Tokyo, décorent parfois leurs stations pour l’occasion.

Les neko cafés, quant à eux, organisent des événements spéciaux, offrant par exemple des réductions aux visiteurs arborant un accessoire félin ou mettant en avant l’adoption de chats abandonnés. Les lieux spirituels associés aux félins, comme par exemple le ou, attirent aussi de nombreux visiteurs venus chercher des porte-bonheurs sous forme d’ema ou d’amulettes maneki neko, symboles de chance et de prospérité.

Enfin, certaines mascottes félines emblématiques du Japon sont à l’honneur ce jour-là. Parmi elles, Maru, le célèbre chat de YouTube connu pour son amour des boîtes en carton, fait partie des vedettes célébrées. Les chaînes de télévision diffusent même des émissions spéciales dédiées aux chats les plus populaires du pays, ajoutant à l’engouement général de cette journée placée sous le signe des félins.

MANEKI NEKO, LE CHAT PORTE-BONHEUR JAPONAIS

Le maneki neko est sans doute l’une des figurines les plus emblématiques du Japon. Placé à l’entrée des commerces, restaurants et temples, ce chat porte-bonheur est censé attirer la fortune et le succès. Souvent en céramique, il fait partie intégrante du paysage japonais et constitue un souvenir très apprécié des visiteurs, l’un des plus achetés par les voyageurs au Japon. Son origine remonte à l’époque d’Edo (1603-1868), bien que plusieurs légendes existent à son sujet. L’une des plus populaires raconte l’histoire d’un seigneur surpris par un orage près du temple Gotoku-ji à Tokyo. Alors qu’il cherchait refuge sous un arbre, il aperçut un chat qui levait la patte comme pour l’inviter à s’approcher. Intrigué, il s’avança et, à cet instant, la foudre frappa l’endroit qu’il venait de quitter. Reconnaissant, il fit un don généreux au temple, qui prospéra par la suite. C’est ainsi que le maneki neko serait devenu un symbole de chance et de protection.

Le maneki neko se reconnaît facilement à sa posture caractéristique : une patte levée, comme s’il faisait signe d’approcher. Mais ce détail a toute son importance, car selon la patte levée, la signification change. Lorsqu’il lève la patte droite, il attire la richesse et la prospérité financière. Avec la gauche, il invite les clients et favorise la réussite commerciale. Certains modèles montrent même un chat levant les deux pattes, symbole de protection renforcée, bien que ce design soit parfois perçu comme un signe d’avidité excessive. Le maneki neko porte souvent un collier rouge orné d’une clochette, un détail inspiré des colliers que l’on attachait aux chats des temples pour les distinguer des errants et les protéger des mauvais esprits. Dans sa patte, on trouve généralement une pièce d’or ovale, un koban, sur laquelle est inscrit en japonais « 10 millions de ryo », une somme en ancienne monnaie japonaise qui représentait une richesse colossale à l’époque d’Edo, faisant du maneki neko un véritable symbole d’abondance et de prospérité.

Au-delà de sa posture, sa couleur peut également revêtir une signification particulière, bien que cela soit un ajout commercial plus anecdotique :

  • Rose : amour et relations harmonieuses
  • Blanc : pureté et bonheur
  • Doré : richesse et prospérité
  • Noir : protection contre les mauvais esprits
  • Rouge : santé et longévité
  • Vert : réussite académique
  • Bleu : succès professionnel

Si on le croise principalement dans les commerces, on trouve aussi le maneki neko dans certains foyers, placé près de l’entrée ou dans un coin lié à la fortune. Il n’y a pas de règle stricte, mais l’idée est qu’il reste bien visible pour remplir son rôle. Plusieurs temples et sanctuaires au Japon sont quant à eux directement associés à ce porte-bonheur. Par exemple, le temple Gotoku-ji à Tokyo, considéré comme son berceau, le temple Unrin-ji à Hagi, ou le temple Chikurin-ji à Kochi, qui en possèdent en leur enceinte. Aujourd’hui encore, le maneki neko continue d’occuper une place de choix au Japon. Qu’il soit posé sur un comptoir, offert en guise de vœu ou collectionné sous différentes formes, il perpétue une tradition de plusieurs siècles, témoignant du lien fort entre les Japonais et leurs porte-bonheurs félins.

LES ENDROITS OÙ VOIR DES CHATS AU JAPON

Les chats errants sont omniprésents dans les temples et sanctuaires, ainsi que dans les ruelles des quartiers résidentiels. Mais certains lieux sont particulièrement réputés pour leur population féline, notamment plusieurs « îles aux chats », de petites îles où ils se retrouvent en grand nombre. Voici donc quelques exemples avec 10 endroits incontournables pour voir des chats au Japon :

  • L’île de Tashirojima (préfecture de Miyagi)
    Proche de Matsushima et surnommée « l’île aux chats », Tashirojima compte plus de félins que d’habitants. Autrefois, ils étaient gardés pour protéger les élevages de vers à soie des rongeurs, mais aujourd’hui, ils sont choyés par les résidents et les visiteurs. Ici, les chiens sont interdits, et les chats se promènent en toute liberté, accueillant les touristes avec une nonchalance toute féline. L’île abrite 51 monuments en forme de chats, témoignant de l’importance culturelle de ces animaux pour les habitants.
  • La gare d’Ashinomaki Onsen (préfecture de Fukushima)
    Dans la préfecture de Fukushima, la gare d’Ashinomaki Onsen est un petit arrêt rural dont le chef est… un chat ! Depuis plusieurs années, un félin nommé Sakura occupe ce poste honorifique, attirant les visiteurs qui viennent le rencontrer dans son bureau aménagé spécialement pour lui. D’après le site officiel, les principales tâches des chefs de gare incluent l’accompagnement des départs de train, des rondes dans la gare et la mission d’apporter un peu de réconfort aux voyageurs dans la salle d’attente. Les photos sont interdites afin de ne pas importuner le chef de gare.
  • Le temple Gotoku-ji (Tokyo)
    Situé dans un quartier paisible de Tokyo, le temple Gotoku-ji est célèbre pour ses innombrables maneki neko. La légende raconte qu’un chat aurait sauvé un seigneur de la foudre en l’attirant dans le temple, ce qui aurait fait de cet endroit le berceau du maneki neko. On n’y croise pas de véritable chat à proprement parler, mais les milliers de figurines sont particulièrement impressionnantes.
  • Le sanctuaire Imado-jinja (Tokyo)
    Autre lieu emblématique de la capitale, le sanctuaire Imado-jinja est un petit havre de paix où les chats sont rois. On y trouve de nombreuses statues de félins en céramique, et il est particulièrement apprécié des couples qui viennent y prier pour la chance en amour et le bonheur domestique.
  • Le temple Gotanjo-ji (préfecture de Fukui)
    Surnommé le « temple des chats », le temple Gotanjo-ji abrite une véritable communauté féline. Les moines veillent sur eux avec bienveillance, et les visiteurs peuvent les observer se prélassant paisiblement dans l’enceinte du temple. On y trouve également un daibutsu (grande statue de Bouddha) sur lequel deux chats font un câlin.
  • Neko no Komichi (préfecture de Hiroshima)
    Dans la charmante ville d’Onomichi, Neko no Komichi (« le chemin des chats ») est une ruelle sinueuse de 200 mètres longeant le sanctuaire Ushitora-jinja, le plus ancien de la ville. Protégée par un imposant camphrier, cette allée paisible est devenue un havre pour les amoureux des chats et des arts. L’artiste Haruji Sonoyama y a joué un rôle clé avec son projet Onomichi Ihatov, rénovant des maisons traditionnelles et transformant le quartier en un espace artistique où cohabitent hommes et félins. Aujourd’hui, la ruelle abrite boutiques, galeries et cafés, galeries installés dans d’anciennes demeures japonaises. Parmi les curiosités du lieu, les fukuishi neko, des pierres rondes peintes en forme de chats, sont disséminées un peu partout. Chaque année en mai, le quartier célèbre le Neko Matsuri, un festival où seuls les « chats », c’est-à-dire les visiteurs costumés, peuvent accéder à certaines zones, tandis que des animations et expositions plongent le quartier dans une ambiance féline unique.
  • L’île de Sanagijima (préfecture de Kagawa)
    Encore une île où les chats sont omniprésents ! Ici, ils vivent en harmonie avec les habitants et les pêcheurs qui les nourrissent. C’est un endroit paisible, idéal pour ceux qui veulent observer les chats dans un cadre naturel. L’île de Sanagijima est aussi connue pour une attraction originale : les chats qui sautent entre les sections déconnectées d’une digue près du port de Honura. Cependant, ces félins ne sont pas toujours très enclins à bondir d’eux-mêmes. Pour les voir en plein saut, il faut parfois les motiver avec un peu de nourriture.
  • L’île d’Aoshima (préfecture d’Ehime)
    Aoshima est l’une des îles aux chats les plus célèbres du Japon. Autrefois habitée par de nombreux pêcheurs et leurs familles, l’île s’est peu à peu vidée de ses résidents humains, laissant derrière eux des générations de chats, autrefois chargés d’éloigner les rongeurs des filets de pêche. Aujourd’hui, la population féline dépasse largement celle des humains, faisant d’Aoshima un véritable paradis pour les amoureux des chats. Ceux-ci vivent en totale liberté, profitant du soleil et de la mer sous l’œil bienveillant des quelques habitants restants. Si l’île continue d’attirer les visiteurs fascinés par ces félins emblématiques, leur nombre diminue peu à peu. Un programme de stérilisation mis en place en 2018 a stoppé toute nouvelle naissance, et la plupart des chats restants sont désormais âgés.
  • L’île d’Ainoshima (préfecture de Fukuoka)
    Dans la préfecture de Fukuoka, l’île d’Ainoshima est un peu moins connue que Tashirojima ou Aoshima. Les chats se promènent tranquillement, sans se soucier des visiteurs venus surtout pour les observer. Il n’y a pas grand-chose à faire sur l’île, à part flâner et passer du temps avec les chats. On y trouve quelques plages de galets pour ceux qui souhaitent se baigner, ainsi que quelques sanctuaires. Attention, il est important de ne pas nourrir les chats, car cela peut déranger les habitants qui y vivent encore.
  • Unzen Onsen (préfecture de Nagasaki)
    Dans la préfecture de Nagasaki, Unzen Onsen est une station thermale connue pour ses paysages volcaniques spectaculaires… et ses nombreux chats errants ! Ils se prélassent près des sources chaudes, semblant apprécier la vapeur et la chaleur qui s’échappent du sol. Une rencontre féline dans un décor insolite !

J’espère que cet article vous aura permis de mieux comprendre la place unique qu’occupent les chats au Japon, de leur arrivée sur l’archipel à leur présence dans la culture et les lieux emblématiques du pays. Que vous soyez intrigué par les îles aux chats, curieux de découvrir les temples qui leur sont dédiés ou simplement amateur de félins, le Japon offre plein d’occasions de croiser ces adorables compagnons. Pour encore plus de découvertes, n’hésitez pas à consulter mes autres articles sur 14 îles à découvrir au Japon ou encore sur Pokéfuta, les plaques d’égout Pokémon au Japon.

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *