Toji, le solstice d’hiver au Japon
Toji, le solstice d’hiver au Japon

Toji, le solstice d’hiver au Japon

Lorsque vient le début de l’hiver au Japon, le quotidien s’illumine grâce aux splendides illuminations hivernales, aux marchés de Noël, et à l’atmosphère chaleureuse qui envahit les rues. À cette même période, un événement plus discret se déroule : Toji, le solstice d’hiver. Ce jour marque le début officiel de l’hiver dans l’hémisphère Nord, correspondant au jour le plus court de l’année. Aujourd’hui, je vous propose de découvrir cet événement saisonnier méconnu au Japon.

TOJI, LE JOUR LE PLUS COURT DE L’ANNÉE

Au Japon, les événements astronomiques tels que les équinoxes et solstices sont particulièrement célébrés, les équinoxes de printemps et d’automne étant même des jours fériés durant lesquels on en profite pour rendre hommage à ses ancêtres. Toji correspond quant à lui au solstice d’hiver, marquant le jour le plus court et la nuit la plus longue de l’année. Observé le 21 ou 22 décembre (variant selon le calendrier solaire), ce jour voit le soleil atteindre son point le plus bas dans le ciel. À Tokyo, par exemple, la durée du jour est réduite d’environ 5 heures par rapport au solstice d’été.

  • Toji 2024 : 21 décembre 2024
  • Toji 2025 : 22 décembre 2025
  • Toji 2026 : 22 décembre 2026

Après un automne japonais très tardif, dont les couleurs s’étendent souvent jusqu’à mi-décembre, Toji marque l’entrée dans l’hiver, mais symbolise aussi l’espoir d’un retour progressif à des jours plus lumineux. En effet, cette journée la plus courte de l’année signifie qu’à partir de ce moment, les jours seront, petit à petit, de plus en plus lumineux. Par ailleurs, Toji tombe dans une période particulière, au crépuscule d’une année qui s’achève et dans l’attente pleine d’espoirs du Nouvel An et de ses nombreuses festivités.

UN BAIN DE YUZU

La célébration de Toji relève davantage du rituel et de la tradition que d’une véritable fête. Cette occasion est ainsi marquée par des pratiques symboliques visant à accueillir la nouvelle saison avec chance et santé. L’un des rituels les plus emblématiques pour Toji consiste à prendre un bain chaud agrémenté de yuzu, les fameux agrumes japonais. Leurs propriétés curatives favorisent la circulation sanguine, apaisent le corps et préviennent des maladies hivernales, tandis que leur arôme puissant repousse les mauvais esprits. L’origine de cette coutume remonte probablement à l’introduction du bouddhisme au Japon, avec l’idée que l’eau chaude permettait de purifier le corps et l’esprit des impuretés. Cette pratique s’est ensuite répandue à travers le pays, notamment à l’époque d’Edo (1603-1868) avec l’émergence des sento, les bains publics japonais, qui ont commencé à proposer des bains de yuzu afin d’attirer les clients. Une théorie populaire associe cette pratique à un jeu de mots : les termes solstice d’hiver (toji) et cure thermale (toji) se prononcent de la même manière, ce qui aurait favorisé la diffusion de cette coutume. Traditionnellement, le bain de yuzu consiste à faire flotter des fruits entiers dans l’eau chaude, enveloppant les lieux de leur apaisant parfum d’agrumes. Aujourd’hui, certaines personnes préfèrent couper les fruits pour libérer davantage de jus et de bienfaits médicinaux, ou bien les hacher et les placer dans un sac en tissu pour éviter les résidus.

Chaque hiver, de nombreux onsen et sento organisent des campagnes spéciales durant lesquelles ils proposent des bains de yuzu à leurs clients. Si vous envisagez de voyager au Japon durant cette saison, c’est un bon moment pour faire trempette ! Beaucoup de familles japonaises profitent de cela à la maison, en plongeant des yuzu frais ou des produits de bain parfumés aux yuzu dans leur baignoire. C’est notamment pourquoi les ventes de yuzu explosent en cette période. Une manière simple de se plonger dans cette tradition hivernale et de savourer un moment de bien-être.

DU POTIMARRON ET QUELQUES DOUCEURS

Outre le bain de yuzu, il existe d’autres pratiques liées à Toji, notamment au niveau de l’alimentation : ce jour-là, il est en effet de coutume de cosommer du kabocha, le potimarron japonais. Autrefois, le kabocha était l’un des rares légumes jaunes-verts accessibles à cette période de l’année, et, grâce à sa longue conservation et sa richesse en vitamine C, constituait une précieuse réserve nutritive pour affronter les rigueurs de l’hiver et prévenir les maladies saisonnières. Aujourd’hui encore, qu’il soit mijoté en ragoût, enrobé en tempura, ou décliné en soupe ou dessert, ce potimarron japonais incarne la prospérité et la vitalité, des symboles forts pour Toji.

En parallèle, il existe pour Toji une croyance qui valorise les aliments contenant la lettre « n » dans leur nom, une référence phonétique à la fin de l’année dans la langue japonaise, « n » étant la dernière « lettre » du syllabaire japonais. Cette pratique, connue sous le nom de Toji no Nanakusa (« les sept herbes du solstice d’hiver »), associe ces aliments à la prospérité et à la chance, chaque « n » doublant symboliquement la fortune. Parmi ces aliments, on trouve par exemple les nouilles udon, le kanten (agar-agar), les agrumes kinkan (kumquat), les ginnan (noix de ginkgo), ou les carottes (ninjin).

LES ÉVÉNEMENTS POUR TOJI

Contrairement à d’autres rituels, Toji n’est clairement pas une célébration principale qui s’accompagne d’événements festifs. Certains sanctuaires prennent vie en ce jour, mais l’ambiance reste assez sobre, discrète et locale. On y trouve principalement des stands où sont vendus des yuzu et des décorations pour la fin d’année. Sans être spectaculaires, ces initiatives apportent une note festive et conviviale à la journée.

Voici tout de même quelques événements à découvrir à l’occasion de Toji, le solstice d’hiver :

  • Ana Hachiman-gu Toji Sai à Tokyo
    Dans le quartier de Waseda à Tokyo, le sanctuaire Ana Hachiman-gu célèbre Toji avec des petits stands vendant du yuzu et des décorations de fin d’année, ainsi qu’une distribution d’amulettes ichiyo raifuku. Ces talismans sont censés attirer la chance et favoriser la prospérité, notamment dans les affaires et les finances. Ils symbolisent le renouveau, à l’image de l’allongement des jours après le solstice et du retour de la lumière. Bien que l’événement ne soit pas grandiose, c’est l’un des rares de la capitale à célébrer Toji.
  • Issan-jinja Toji Sai à Saitama (préfecture de Saitama)
    Dans la ville de Saitama, le sanctuaire Issan-jinja organise une cérémonie de purification accompagnée de rituels tels que le hiwatari, la marche sur le feu, afin de purifier spirituellement les croyants. La cérémonie commence à 14h, et le rituel de marche sur le feu environ 30 minutes plus tard.
  • Imizu-jinja Toji Sai à Takaoka (préfecture de Toyama)
    Depuis 2011, le sanctuaire Imizu-jinja célèbre Toji par un rituel en hommage aux victimes de catastrophes passées et en prière pour le bonheur des foyers. Des yuzu et des courges, offerts par le marché de Takaoka, sont déposés devant la divinité. La danse rituelle Ryoo, surnommée « la danse du coucher de soleil », accompagne cette cérémonie solennelle. À l’issue du rituel, on reçoit des yuzu consacrés et on peut déguster un thé au yuzu pour se réchauffer.
  • Kabocha Summit à Nishio (préfecture d’Aichi)
    Célèbre pour ses courges, le temple Myozen-ji, ou Hazu Kannon, entretient un lien unique avec ces légumes. Chaque année, de septembre à décembre, un événement dédié se tient, attirant des variétés venues de tout le Japon. Le jour du solstice d’hiver, on peut déguster un délicieux kabocha shiruko (soupe sucrée au potimarron) et flâner sur un marché de produits locaux. On traverse aussi un anneau décoré de mini-courges, censé porter bonheur, ou on touche une courge géante portée en mikoshi, symbole de protection et de prospérité.
  • Sukunahikona-jinja Toji Sai à Osaka
    Au sanctuaire Sukunahikona-jinja d’Osaka, la célébration de Toji s’accompagne d’une prière pour maintenir la santé physique et mentale. Des amulettes Ichiyo Raifuku sont également distribuées.
  • Munetada-jinja Toji Sai à Okayama (préfecture d’Okayama)
    À Okayama, le sanctuaire Munetada-jinja célèbre le solstice d’hiver comme un moment de renouveau. Ce jour, qui marque aussi la naissance de sa divinité, est associé au concept d’ichiyo raifuku, le retour de la lumière après l’obscurité.

J’espère que cet article vous aura permis d’en savoir plus sur cette coutume de Toji, le solstice d’hiver au Japon qui marque l’entrée dans la saison hivernale. Pour encore plus de découvertes culturelles, n’hésitez pas à consulter mes autres articles sur Tsukimi, la fête de la lune au Japon ou encore Tanabata, la fête des étoiles.

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